Laissez-vous bercer par les vies secrètes des suites juniors, composées d’une chambre, d’un salon et d’un petit cabinet d’écriture, offrant tout le confort moderne et une atmosphère bien parisienne, où jaillissent les « parfums », les « caresses », la « bulle irisée » de La Recherche.
Chaleureuses par leur décor Belle Epoque, baignées de lumière grâce à leurs deux fenêtres qui plongent sur les hauts platanes et la belle architecture du Carreau du Temple, elles associent dans un rare raffinement, leurs tissus précieux aux tableaux accrochés aux murs, qui vous transportent hors du temps, dans la splendeur éphémère ou prolongée de plaisirs partagés.
EQUIPEMENTS
L’amie de Flaubert et de Dumas
« Sans Napoléon 1er, je vendrais des oranges dans les rues d’Ajaccio ! », assure la princesse Mathilde, née Bonaparte, qui sait ce qu’elle doit à son oncle. Son salon de la rue de Berri accueille toutes les célébrités du monde des lettres, des arts et de la politique. Quand il la rencontre, Marcel Proust a vingt ans. L’écrivain connaît sa vie agitée, fiançailles brisées, mariages ratés, séparations violentes. Il a compris qu’elle est « un personnage de fiction, une véritable création littéraire » et s’en inspire pour Madame Verdurin.
Nouvelle
Retirée dans sa chambre, la princesse Mathilde regarde d’un œil un peu las les oiseaux à la crête rouge et jaune posés sur le léger feuillage de l’étoffe murale. Elle a peint des aquarelles toute la matinée, s’est promenée dans les jardins du Palais de l’Elysée que possède son amant, le comte Emilien de Nieuwerkerke, puis a bavardé longuement avec Gustave Flaubert avec qui elle entretient une correspondance régulière. Elle les connaît tous, sait les accueillir, les consoler, les protéger, ces écrivains qui se pressent quotidiennement dans son salon, particulièrement apprécié parce qu’elle en a banni l’étiquette: les Goncourt, Tourgueniev, Mérimée, Sainte-Beuve, Taine, Dumas père et fils, Gautier qui est devenu son bibliothécaire, Barrès à qui, comme plus tard au jeune Proust, elle a donné un morceau de sa robe pour qu’il en fasse une cravate. Ce dernier est très sensible à la simplicité avec laquelle cette « première altesse » parle de ce qui touche à la naissance et au rang, ainsi qu’à son réel intérêt pour les écrivains. Ce dimanche soir de l’année 1846, la princesse a dîné de bonne heure. Elle recevra à nouveau mercredi.
UNE GRANDE DAME DU SIÈCLE
En 1894, la jeune, jolie et piquante Colette rencontre Marcel Proust chez Léontine de Caillavet. L’entrevue est manquée : la romancière n’apprécie guère l’excessive politesse de celui qu’elle qualifie de « petit complimenteur. » Il faudra des années avant qu’elle lise Du côté de chez Swann. C’est une révélation. Commence alors un fructueux échange épistolaire. Marcel Proust a une admiration éperdue pour le talent de cette femme affranchie, aux aventures amoureuses libres et multiples. L’admiration est réciproque : d’un grand écrivain à un autre, ils se sont reconnus…
Nouvelle
« A cause de mon noble père plutôt lunatique qui est le mien, j’ai besoin d’un papa, d’un ami, d’un amant… Dieu ! d’un amant !…// C’est bien la peine d’avoir tant lu pour que ce seul mot, traversant ma cervelle, me fasse serrer les dents et crisper les doigts de pied… » Qu’elle était jeune quand elle a écrit ces lignes ! Amusée, Sidonie-Gabrielle referme son livre, Claudine à Paris : Il est tard. Au lieu de retrouver son cabinet d’écriture pour noter son entrevue enthousiasmante avec la reine Marie de Roumanie, arrivée en cette nuit de 1919 à Paris, elle baisse la lumière de sa lampe qui forme un halo sur les tentures claires. De la fenêtre, elle aperçoit des ombres filant sur le trottoir, que la lumière des réverbères étire presque à l’horizontale. Songeuse, elle pense à ce singulier Marcel qui, en pleine parution de son roman, A l’ombre des jeunes filles en fleurs, lui a écrit : « J’ai pleuré pour la première fois depuis longtemps, en lisant la lettre de Mitsou. »
UNE GRANDE MÉCÈNE
Elle fascine avec son port de reine et ses yeux d’un noir qui peuvent foudroyer comme caresser. C’est la plus belle femme qu’il ait jamais vue, dira Marcel Proust : Elisabeth Greffulhe a d’abord été agacée par cette admiration excessive. Il faudra des années pour qu’elle invite l’écrivain dans son salon, où cette républicaine convaincue encourage toute forme de progrès. Son admirateur en fera sa duchesse de Guermantes, figure de la femme du monde, brillante souvent, cruelle parfois, bête à l’occasion comme les gens trop intelligents…
Nouvelle
Dans son cabinet d’écriture aux moulures dorées, elle est d’humeur morose. En cette année 1894, Goncourt a recalé son idée de publier ses carnets intimes sur « les états d’âme de la femme du grand monde, sur ses sensations, sur ses impressions, sur les victoires de la beauté et de l’élégance ». Elle y raconte la folle « caresse anonyme » qui l’étreint au contact avec la foule de l’opéra, ou encore ses amours malheureuses avec Henry, son mari, qui la trompe sans vergogne et surtout, la brutalise. Trop narcissique, trop intime lui a asséné Goncourt, qui lui a conseillé de se contenter de son piano et de ses cours de photographie avec le grand Nadar. Il lui faut se alors concentrer sur ses combats contre les royalistes et en faveur de Dreyfus. La comtesse prend sa plume. Le billet est adressé à Henry : «Nous ne dépendons de personne ; et nous devons avoir le courage de notre opinion. C’est un luxe, et le plus grand de tous.»
SALONNIÈRE ET ARTISTE
Alexandre Dumas fils, qui fut son amant, assure joliment : « C’est elle qui a créé le plus de roses après Dieu. » Muse exigeante et femme de tête, Madeleine Lemaitre peint, mais aussi, inspire et reçoit : le Tout Paris se précipite dans ses soirées déguisées ou musicales. L’écrivain se nourrit de « sa belle marraine » pour créer le personnage de Madame Verdurin, figure emblématique d’une bourgeoisie en quête d’ascension sociale, au caractère bien trempé, qui déteste les « ennuyeux » et possède un goût certain pour les « exécutions. »
Nouvelle
L’ouvrage est ouvert sur le lit, Madeleine trouve médiocre l’impression de ses illustrations. Pour son premier livre, Les Plaisirs et les jours, particulièrement luxueux puisqu’il contient également une préface d’Anatole France et quatre pièces pour piano de Reynaldo Hahn, Marcel Proust lui a commandé une série de dessins. Houx et fougères, marronniers et pissenlits encadrent les nouvelles et les poèmes rassemblés ici par le jeune auteur. Si elle a participé à la maquette du livre, la décision finale est revenue à l’éditeur, Calmann-Lévy, qui compte bien publier l’ouvrage en cette année 1896. Elle ne peut s’empêcher d’esquisser une moue dubitative en découvrant ses fleurs de trèfle servir d’en-tête au Coucher de soleil intérieur et ses branches de marronniers illustrer Sous-bois qui ne parle aucunement de ces arbres… Qu’importe : le résultat esthétique lui semble satisfaisant. Et elle peut se consoler en relisant les mots d’Anatole : « Heureux livre que le sien ! Il ira par la ville tout orné, tout parfumé des fleurs dont Madeleine Lemaire l’a jonché de cette main divine qui répand les roses avec leur rosée. »
L’ÉGÉRIE D’ANATOLE FRANCE
Léontine de Caillavet a quarante-cinq ans quand elle accueille Marcel Proust pour la première fois, dans son salon de l’avenue Hoche. Leur lien ? Anatole France. Léontine en a fait son amant –qui en a fait sa muse–, et son salon, rempli d’esprits particulièrement agiles, est bâti autour de lui. Intelligente et cultivée, Léontine est aussi curieuse de politique que de littérature. Marcel Proust attribuera quelque uns de ses traits à Madame Verdurin.
Nouvelle
Allongée sur de moelleux coussins, Léontine repense à sa soirée d’hier, dans son salon de l’avenue Hoche. Pas moins de cent invités ! Écrivains, députés, avocats, comédiens, peintres. Elle rit encore de la scène que lui a rapportée un habitué. Dès que son époux voit une nouvelle figure parmi ses invités, il paraît qu’il se précipite et lui dit : « Je ne suis pas Anatole France.» Elle repense à la préface du premier ouvrage de son ami Marcel Proust, Les Plaisirs et les jours, commandée à France. Personne n’en a jamais rien su : c’est elle, l’auteur de ces lignes enthousiastes. Elle repense aussi avec exaltation à son amant : comme chaque matin, elle a fait l’amour à Anatole avec une énergie passionnée. C’est son idole…
UN MONSTRE SACRÉ
Sarah Bernhardt est un miracle de comédienne qui sait aussi bien interpréter les hommes que les femmes et qui les aiment tout autant. Mettant en scène chaque minute de sa vie, menteuse, mystique, excentrique, grande amoureuse, celle pour qui Cocteau a inventé l’expression de « monstre sacré » possède un immense talent. Marcel Proust en est fou : il en a fait sa Berma, admirée par Swann, adulée par Bergotte, idolâtrée par le narrateur…
Nouvelle
Onguents et poudres s’entassent sur la petite commode du boudoir, tapissé de tentures qui lui rappellent les rideaux de scène. Comme d’habitude, la représentation s’est terminée sous des applaudissements frénétiques. La salle était enthousiaste : des roses par dizaines ont volé jusqu’à la scène. Ses nombreux prétendants le savent : la grande Sarah aime follement ces fleurs, autant que les bijoux et tout ce qui brille. Elle est fière d’être la première actrice française à avoir réalisé des tournées sur les cinq continents. Son succès est international ? Cela ne lui suffit pas. Depuis 1874, elle s’est mise au modelage, puis à la peinture dans la fameuse Académie Julian.
PRÉCURSEUR DE LA PEINTURE MODERNE
Rejeté par les peintres académiques et les salons officiels de son temps, ce précurseur de la peinture moderne est l’un des chefs de file de toute une génération d’artistes épris de liberté. Cet ami de Zola, de Baudelaire et de Mallarmé a inspiré Marcel Proust pour son personnage d’Elstir. Dans La Recherche, les asperges d’Elstir sont, bien sûr, celles de Manet. Et puis, on le sait pour Marcel Proust qui se l’applique à lui-même quand il écrit : le sujet apparent d’une œuvre n’est rien, tout est dans l’art de recréer, suggérer, faire exister.
Nouvelle
A LA RECHERCHE DE L’IMPRESSION
Mondialement célébré pour ses peintures de nus féminins, Pierre-Auguste Renoir réalise une œuvre abondante dont le style évolue au fil des décennies : impressionniste, réaliste, classique… Le lien entre Marcel Proust et l’artiste ? Un célèbre tableau : le Déjeuner des canotiers. Dans La Recherche, Marcel Proust attribue l’œuvre à Elstir et le place dans la collection du duc de Guermantes. Ce Maître de l’impressionnisme fait ainsi partie des peintres qui inspirent Marcel Proust pour sa pensée sur l’art : rechercher l’impression, la grande vérité de la vie.
Nouvelle
Cette jeune femme au bord de l’eau l’enchante. La vue de ce délicieux tableau lui rappelle son ami Charles Ephrussi. Le collectionneur possédait chez lui une impressionnante collection de peintures impressionnistes dont plusieurs de ses toiles. Hélas : le seul tableau où il l’avait représenté, son Déjeuner des canotiers, peint en 1880, avait été achetée par le collectionneur Balensi. Il sait cependant qu’Ephrussi, avant sa mort, avait pu l’admirer chez le marchand d’art Durand-Ruel. Sur la toile, c’est bien Ephrussi, l’homme qui se tient debout en arrière-plan et dont le chapeau haut de forme semble incongru au milieu de cette fête champêtre. C’était sa période encore impressionniste. Désormais, il est revenu à une peinture plus classique. Le critique d’art Gaston Gallimard vient d’ailleurs de rédiger un article sévère sur son nouveau style. Il se souvient avec nostalgie des deux étés passés dans la propriété de son ami Paul, le père de Gaston. Alors tout jeune, Gaston le regardait peindre avec admiration…
LE POÈTE DU SPLEEN
S’ils surplombèrent tous les deux leur siècle, ils ne purent se rencontrer, Marcel Proust étant né quatre ans après la mort de Charles Baudelaire. A travers un nombre incalculable de références réelles ou fictives, toute l’œuvre de l’écrivain est cependant imprégnée de l’admiration que Marcel Proust voue au poète, véritable frère de sensibilité pour lequel « la seule vie réellement vécue » pouvait être atteinte grâce à l’art. A la fois provocateurs et sincères, tous deux ont renouvelé la poésie et le roman par des œuvres annonçant la modernité.
Nouvelle
« Mon cher Rivière, une grave maladie m’empêche malheureusement de vous donner, je ne dis pas une étude, mais un simple article sur Baudelaire. Tenons-nous en faute de mieux à quelques petites remarques. Je le regrette d’autant plus que je tiens Baudelaire –avec Alfred de Vigny- pour le plus grand poète du XIXème siècle. Je ne veux pas dire par là que s’il fallait choisir le plus beau poème du XIXème siècle, c’est dans Baudelaire qu’on devrait le chercher. Je ne crois pas que dans toutes les Fleurs du mal, dans ce livre sublime mais grimaçant, où la pitié ricane, où la débauche fait le signe de la croix, où le soin d’enseigner la plus profonde théologie est confié à Satan, on puisse trouver une pièce égale à Booz endormi. (Hugo)// Mais à côté d’un livre comme les Fleurs du mal, comme l’œuvre immense d’Hugo paraît molle, vague, sans accent// Peut-être, hélas !, faut-il contenir la mort prochaine en soi, être menacé d’aphasie comme Baudelaire, pour avoir cette lucidité de la souffrance véritable… »
Marcel Proust : Lettre de Marcel Proust à Jacques Rivière, directeur de La Nouvelle revue Française, juin 1921.
LE MAGNIFIQUE SALTIMBANQUE
Cocteau est danseur, Cocteau est voltigeur, Cocteau est poète. Son génie à lui est sa jeunesse d’esprit, son esprit fantasque. Il filme, joue, écrit, dessine, peint, photographie. Son admiration pour l’auteur de La Recherche est teintée de rancœur. Le magnifique saltimbanque n’a-t’il jamais aimé Proust ? Il lui survivra quarante ans, mais son œuvre aura une gloire plus éphémère. Dans leur sensibilité, leur sens aigu de la poésie, ils sont jumeaux, mais ne se l’avouent guère.
Nouvelle
Allongé sur le lit en « peignoir blanc, sali de résidu d’opium et de trous de cigarette, un foulard autour du cou, très serré… », Jean Cocteau est fatigué. Il est trois heures du matin. Il vient de quitter le 102 boulevard Haussmann, antre étouffante de Marcel Proust qui, pour l’épater, lui a lu des pages de sa « cathédrale ». Mauvaise idée : Cocteau n’aime pas sa voix trop perchée. De plus, c’est un mauvais lecteur : il s’embrouille dans les lignes, s’interrompt à mauvais escient, pouffe, reprend, s’agace… Pourtant, il sent du génie chez cet insomniaque bondissant et, ce qui lui manque, à lui : du courage. Il papillonne trop, rêve trop, se disperse en mondanités stériles. Son jeune compagnon l’impressionne dans sa constance à écrire des heures durant A la Recherche du temps perdu. Pour l’heure, mascara et poudre de riz forment tapon sur son visage d’aigle. Immobile sur son lit, le poète fixe les moulures du plafond en fumant une cigarette. Des volutes de fumée se dispersent dans l’air confiné de la chambre, tapissée de toile de jute imprégnée d’odeurs de différentes substances… Il murmure :
« La rue meurt de la mer. Ile Faite en corps noirs. Fenêtres sur la rue meurent De jalousies. La chambre avec balcon sans Volets sur la mer… »
L’Hôtel.
DANS LE BEAU MONDE
Assis dans un rocking-chair, le petit doigt replié sur la lèvre, Marcel Proust regarde les jeunes filles en fleurs. En villégiature, il retrouve régulièrement Cabourg, le Balbec de La Recherche, où l’on mène la même vie que dans la Plaine Monceau. A Paris, insatiable de la vie mondaine, le dandy flamboyant court de palaces comme le Ritz en restaurants comme Maxim’s, de salles de spectacles en hôtels particuliers où se déroulent les prestigieux salons fréquentés par la haute bourgeoisie et l’aristocratie de la Belle Epoque. Un Paris à la fois réel et imaginaire transposé dans La Recherche, créé par le plus grand écrivain du XXème siècle.
Extrait de La Recherche, Marcel Proust
« Albertine n’avait-elle pas été devant l’hôtel comme une grande actrice de la plage en feu excitant les jalousies quand elle s’avançait dans ce théâtre de nature, ne parlant à personne, bousculant les habitués, dominant ses amies, et cette actrice si convoitée n’était-ce- pas elle qui, retirée par moi de la scène, enfermée chez moi, était à l’abri des désirs de tous qui désormais pouvaient la chercher vainement, tantôt dans la chambre, tantôt dans la sienne où elle s’occupait à quelque travail de dessin et de ciselure ? Sans doute, dans les premiers jours de Balbec, Albertine semblait dans un plan parallèle à celui où je vivais, mais qui s’en était rapproché (quand j’avais été chez Elstir), puis l’avait rejoint, au fur et à mesure de mes relations avec elle à Balbec, à Paris, puis à Balbec encore. »
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